La maison qui rend fou
S’il y a une chose à laquelle je pense lorsqu’il est question de maladie rare, c’est la complexité du processus. Entre l’apparition des symptômes et un diagnostic juste, il se passe en moyenne 7 ans. Ce n’est pas par hasard que les institutions gouvernementales sont décrites comme La maison qui rend fou dans Les 12 travaux d’Astérix. C'est un gouffre sans fond où les formulaires s’empilent, les requêtes abondent, les dossiers tombent entre deux chaises. On te dit que si on ne t’appelle pas, c’est que tout est beau. Mais ça arrive que la feuille se perde quelque part entre la déchiqueteuse et le photocopieur.
Mets-toi dans la peau d’une personne malade pendant un instant.
Un pied dans la porte d’entrée
Commence par obtenir un rendez-vous chez le médecin. Déjà, bravo ! N’oublie pas que 25% des Québécoises et Québécois n’ont pas de médecin de famille. Si des symptômes apparaissent, tu passeras par des listes d’attente et des cliniques sans rendez-vous ou aller attendre un petit 12 heures à l’urgence.
La difficulté quand on fait face à une maladie rare, c’est le manque de connaissances des médecins. Les spécialistes ne pratiquent peut-être pas près de chez toi et tu n’arriveras peut-être pas à en rencontrer un.
Ton généraliste fera habituellement le pont entre tes examens, tes prises de sang, tes consultations avec les spécialistes. Ça sera ton médecin de famille. Quand tu fais partie du 25%, arrange-toi par tes propres moyens et perds-toi dans les dédales du système de santé régi par la bureaucratie.
Tu es l’élu.e
Après des années de déambulation entre les différents professionnels, tu tomberas enfin sur une personne zélée qui accepte de te prendre sous son aile. Célébration ! On te dit qu’on ira au fond des choses ensemble.
Alors, le pire est fait ? Ça se peut, mais le contraire peut arriver. Tu entres dans le monde des maladies rares et tu ouvres une boîte de Pandore.
Une aiguille dans une balle de foin
Le gros souci avec les maladies rares, c’est la variété des symptômes. Ton ressenti est unique, aléatoire et variable. Comprends que chaque personne a une expérience différente face à ses symptômes. Tu le sais bien, chaque jour est une surprise. Des jours, tu pètes le feu; et d’autres, tu aimerais t’arracher des membres. Tu vas rencontrer des médecins condescendants qui vont remettre tes propos en questions, qui croiront tout savoir et qui ne prendront pas au sérieux ta situation.
À ça, tu ajoutes les symptômes qui ne se mesurent pas. C’est pas un résultat de prise de sang ou un résultat de radiographie. Certains symptômes se reposent sur la sensation et selon des niveaux : douleur, fatigue, événements isolés.
Souviens-toi que l’OMS recense plus de 7000 maladies rares. Les combinaisons de symptômes sont complexes et le manque de financement en recherche vont compliquer ton parcours. Personne ne s’intéresse aux maladies rares. Alors tu vas te sentir toute seule, incomprise, laissée à toi-même.
Ça se peut aussi que tu passes par des diagnostics erronés, qui ne tiennent pas compte de certains détails. Quand ça arrive, tu recommences le processus. Oh oui, ça peut arriver !
Et le jour où tu obtiens enfin le bon diagnostic, tu crois que c’est fait, que ça ira mieux. Mais c’est juste le début…