Toi + Moi & le SED
Le sentiment amoureux est à la fois grisant et apaisant. Si bon nombre d’entre nous le cherche ou se complait de l’avoir trouvé, la réalité d’une vie à deux, lorsqu’on porte une maladie comme le syndrome d’Ehlers-Danlos, comporte son lot de défis.
Bien entendu, un partenaire apporte un immense soutien émotionnel, mais aussi pratique. Il nous appuie dans les moments de doute, de peur, de douleur. Mais je mentirais si je ne disais pas ressentir de la culpabilité alors que j’ai toujours l’impression de le ralentir.
Mes limites nous empêchent de partager certains moments ensemble: lorsqu’on doit rester debout durant une longue période, si la distance à marcher s’allonge, s’il y a beaucoup de gens et si ça augmente mon rythme cardiaque. J’ai tendance à refuser de prendre part à des événements, de peur de ne pas y arriver et de casser son moment - assister à des spectacles, par exemple.
L’annonce
Assez tôt dans notre relation, j’ai dû annoncer à mon copain que je portais une maladie rare, cette annonce s’accompagne d’un refus de concevoir un enfant. Ce qui aurait pu mettre en péril un avenir ensemble. Déjà, à la texture de ma peau, il savait qu’il y avait quelque chose de spécial, mais cet homme est trop sensible et ouvert d’esprit pour s’arrêter à ce genre de détail. C’est avec cette même sensibilité qu’il accueille la nouvelle et qu’il m'avoue que, si un jour, avoir un enfant devient une nécessité pour lui, on discutera de notre futur. Ce jour n’est pas arrivé.
Face à la mort
Un peu plus d’un an après notre rencontre, je reçois le diagnostic du SED vasculaire. Au-delà de la texture de ma peau et de sa fragilité, je risque de mourir plus jeune que l’espérance de vie moyenne. Encore là, sensible et ouvert d’esprit, il me dit qu’il tient à notre « nous » et qu’il ne se sauvera pas. Si jamais l’envie de prendre ses jambes à son cou lui prenait, je ne lui en tiendrais pas rigueur. Ça fait peur de savoir que la personne qu’on aime peut décéder à tout moment. Malgré tout, il me soutient dans mes initiatives pour améliorer mon quotidien, il m’écoute quand j’ai peur, il me fait rire quand le désespoir commence à monter. Je suis réellement accompagnée de la meilleure personne du monde.
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Au moment de publier cet article, le 11 décembre 2024, nous soulignons 5 ans de vie commune. Je lui suis reconnaissante de douter moins que moi, de toujours être là alors qu’il aurait 1000 raisons de partir, d’initier des projets ensemble alors qu’on ne sait pas s’ils verront le jour.
Le 11 décembre 2019, assise dans un pub à Montréal, j’étais loin de deviner tout ce qui nous attendait. Je suis arrivée d’avance et lui en retard, comme toujours. Je me souviens de l’avoir vu arriver, se confondant en excuses parce qu’il avait manqué son autobus. C’est exactement à ce moment que j’ai arrêté d’avoir la notion du temps. Parce que tout s’arrête quand on est ensemble. Entre deux paires d’yeux bleus, des rires, des confidences, des heures de discussion sur le cinéma, sur l’humain. Rien n’est tabou entre nous, surtout pas la possibilité que je doive le quitter subitement.
En attendant, je chéris cette vie qu’on traverse ensemble, main dans la main. Je m’accroche à chaque moment de bonheur, et il y en a beaucoup. Si j’ai pigé le mauvais numéro à la loterie de la génétique, j’ai gagné le gros lot en amour.