Comment avoir des plans d’avenir ?
Quel est le cycle normal d’une existence ? Vivre une enfance enrichissante, une adolescence en dents de scie, une vie adulte où on se réalise. Pratiquer un emploi, avoir un partenaire de vie, fonder une famille peut-être, prendre sa retraite, et vieillir tranquillement jusqu’à ce que la maladie nous emporte. En moyenne autour de 82 ans.
Qu’en est-il lorsqu’on vient au monde avec une maladie qui ne guérira jamais ? C’est une vraie question à laquelle je m’efforce de répondre chaque jour. À quoi sert mon existence si je suis déjà vouée à la voir s’écourter.
Et je ne banalise pas mes privilèges. Je vis en Amérique du Nord, j’ai un emploi que j’aime, des relations interpersonnelles incroyables, une maison où je me sens en sécurité, je mange à ma faim, j’ai une bonne santé mentale. Tout ça est merveilleux !
Mais. J’ai une maladie génétique rare qui vient avec une espérance de vie moyenne de 50 ans. Le syndrome d’Ehlers-Danlos vasculaire emporte 50% de ses proies avant l’âge de 50 ans. 80% d’entre elles dépasseront difficilement le 40.
Dans ces circonstances, pourquoi se donner le trouble d’imaginer des plans d’avenir ? À quoi bon cotiser à des REER ? Investir dans une maison, quelle idée ! Pourtant, je le fais. J’économise, j’investis, j’imagine un futur où je suis heureuse et en bonne santé.
D’abord pour moi, pour me donner un semblant de vie normale. Et si vraiment, je neutralise les symptômes de ma maladie par des habitudes de vie exemplaires ? J’ai envie d’un coussin financier sur lequel m’appuyer durant mon espérée retraite. À l’inverse, si je dois arrêter de travailler plus tôt que tard, je veux avoir mon coussin pour éviter de vivre au crochet de l’état.
Et si je meurs jeune, je veux que mon conjoint et ma famille puissent se gâter sur mon bras. Si cette contribution les aide à traverser le deuil avec un peu de douceur, je leur souhaite.
Ne vous imaginez pas que cet élan de générosité est au premier plan. Je la veux, ma belle et longue vie. Pour le simple plaisir de faire mentir les statistiques médicales. J’ai toujours aimé avoir le dernier mot.